Le Lean : trop de moins
Afficher l'article en plein écranComment, en voulant faire toujours mieux avec moins, le "Lean" génère des risques pour la santé des salariés.
Démarche globale touchant l’outil de production, l’organisation du travail, l’activité même de travail, le mode de management, la culture de l’entreprise… le « Lean » se veut bien plus qu’une simple organisation de production parmi d’autres.
Histoire du Lean Management
Né chez Toyota dans les années 1950, ce mode d’organisation s’est ensuite diffusé aux autres industries (années 1990), avant d’être déployé très largement, y compris dans les services. On en trouve aujourd’hui des applications dans tous les secteurs d’activité, jusque dans les administrations publiques et les hôpitaux.
Le Lean Management est un ensemble de principes, de concepts, de règles, d’outils méthodologiques, visant à faire mieux avec moins (Lean = mince, maigre, dégraissé). Les objectifs suivants y sont associés : réduction des stocks, réduction des délais, réduction des « temps morts » ou des « gestes sans valeur ajoutée », réduction de la non-qualité, réduction des investissements « superflus », réduction des effectifs.
EN PRATIQUE
Dans la pratique, les entreprises puisent « à la carte » dans les outils du Lean (5S, TPM, VSM, chantiers Kaizen), ce qui aboutit à des formes de Lean différentes d’une entreprise à une autre. Néanmoins, le raisonnement est quasiment toujours le même : Objectif de réduire les coûts -> identification de la masse salariale comme levier -> il faut diminuer les effectifs -> « c’est possible en s’organisant mieux » -> application de la mode managériale « Lean ».
Les principaux risques pour la santé au travail proviennent de la réduction des marges de manœuvre et de l’impossibilité de faire face à la variabilité irréductible de toute activité. La définition de standards de travail réduit les marges de manœuvre pour la construction d’un mode opératoire personnel sûr et protecteur pour la santé, adapté à sa morphologie, à son âge, à ses déficiences éventuelles, à son niveau de fatigue. Les cartographies de processus présentent une activité lissée, débarrassée des aléas et de la variabilité.
De ce fait, chaque évènement non prévu entraine une tension forte, accentuée par la réduction des délais et des stocks. Cette tension se diffuse rapidement, du fait de l’interdépendance entre les différentes étapes de l’activité.
Conséquences
La suppression des « temps morts », enlève toute possibilité de récupération, mais également toute possibilité de prise de recul et d’anticipation nécessaire à la régulation de l’activité.
On constate au final un accroissement de la pression temporelle, une rigidification de l’organisation collective du travail, une densification du travail (accroissement des temps productifs au poste), une intensification du travail (accroissement du rythme). L’exacerbation de ces contraintes est pathogène : extrême fatigue, stress chronique et troubles associés (sommeil, digestion, cardiovasculaires, etc.), TMS.
Pour en savoir plus : [email protected]
Photo credit: PuzzleMonkey! via Visual Hunt / CC BY-NC-SA