Le logement social change de modèle : quels impacts pour les entreprises et leurs salariés ?
Avec la loi de finances 2018 et la loi ELAN, le gouvernement a initié une refonte profonde du secteur du logement social. OPH, ESH, coopératives, SEM1. Tous les acteurs du secteur sont concernés, et l’ensemble des salariés va connaître des changements importants.
Le logement social a fait la preuve de son utilité pour amortir les effets de la crise de 2008, par son rôle clé pour soutenir tout le secteur économique de la construction et maintenir le pouvoir d’achat des ménages. Mais, bien que la crise du logement perdure en France et que le logement social puisse apporter des solutions efficaces, le thème a été relativement absent du Grand Débat national. Le gouvernement a lancé fin 2017 la mutation à marche forcée du secteur sous un angle purement économique : il faut diminuer le montant des aides publiques au logement et le secteur doit avancer vers l’« autoportage » financier. D’une manière quelque peu injuste (pas de contributions des bailleurs privés), et partiale – rien n’est dit sur l’apport du secteur au modèle social français –, aucune piste d’amélioration du secteur n’est avancée.
Deux grandes dynamiques sont ainsi à l’oeuvre. D’une part, une mutation du modèle économique avec un assèchement des ressources des bailleurs sociaux (RLS, APL2, etc.) à compenser par des ventes de logements. D’autre part, une réorganisation de grande ampleur des opérateurs du secteur, contraints de se regrouper par la loi (seuil des 12 000 logements) et par le choc économique, dans un objectif de rationalisation et de recherche d’économies d’échelle.
Ces deux dynamiques vont façonner la situation économique, la politique sociale et la stratégie des opérateurs de logement social, dans un contexte déjà lourd d’enjeux pour les représentants du personnel : des questions de modèles de compétences et de métiers se posent à tous les acteurs (numérisation, activités de promotion et de syndic, etc.), à quoi s’ajoute le passage au CSE.
UN ACTEUR MAJEUR DE L'ÉCONOMIE, SOCIALEMENT EFFICACE
Le secteur du logement social représente 17 milliards d’euros d’investissement par an. Sur les 45 milliards du PNRU 1 (Programme national pour la rénovation urbaine), 30 ont été apportés par les opérateurs. Le secteur du logement rapporte 74,4 milliards à la collectivité publique, principalement en taxes, à comparer aux 42 milliards investis au titre de la politique du logement.
En 2011, le ministère chargé du logement a estimé le gain de pouvoir d’achat permis par le logement social à 13 milliards d’euros, grâce à des loyers inférieurs au marché privé de 40% en moyenne.
Ainsi, le taux d’effort des ménages pour payer leur loyer est considérablement plus bas dans le logement social que dans le privé. La comparaison européenne (Cour des comptes, 2015) montre un taux d’effort brut – avant toute aide – des ménages français, pour le parc privé, de « 24 %, soit un niveau comparable à ceux de l’Allemagne, de l’Italie ou des Pays-Bas. Pour le parc social, il est en revanche, avec 18 %, plutôt inférieur à ceux de ces mêmes pays. Grâce aux aides personnelles, la France atteint le taux d’effort net moyen (après aide) le plus bas des pays européens. Dans le parc privé, ce taux s’élève à 20 % et dans le parc social à 11 %. »