Négocier la prévention de la pénibilité en entreprise : de nouvelles obligations depuis janvier 2019
Afficher l'article en plein écranA partir du 1er janvier 2019 les entreprises d’au moins 50 salariés (ou appartenant à un groupe de cette taille) doivent négocier un accord « en faveur de la prévention des effets de l’exposition à certains risques professionnels » à certaines conditions. Lesquelles ? Qu'est-ce que l'indice de sinistralité ? Que doit comporter l'accord ? Le point sur la question.
Les entreprises d’au moins 50 salariés (ou appartenant à un groupe de cette taille) doivent négocier un accord « en faveur de la prévention des effets de l’exposition à certains risques professionnels », si :
- Elles emploient une proportion minimale de 25% de salariés exposés, au titre du Compte Professionnel de Prévention (C2P), à un ou plusieurs des 6 facteurs de risques (fixés par les décrets n° 2017-1768 & 1769), et au-delà des seuils prévus.
OU
- lorsque la sinistralité au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP) est supérieure à 0,25**
Attention : cette négociation ne se substitue pas à l’obligation pour l’employeur d’évaluer et de prévenir l’ensemble des risques professionnels, ni au CHSCT-CSE de veiller et de contribuer à cette prévention.
Qui est concerné ?
Ne sont pas dans cette obligation les entreprises entre 50 et 299 salariés qui sont couvertes par un accord de branche étendu conforme à un décret ou à un référentiel de branche homologué par arrêté.
Cette obligation ne concerne que les entreprises privées, les EPIC et les EPA, employant du personnel de droit privé.
Les caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) sont tenues d’informer les employeurs vis-à-vis de leur obligation. En pratique, seules seraient informées les entreprises concernées par l’obligation.
Les 6 facteurs de risque du Compte Professionnel de Prévention (C2P)
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Que doit prévoir un accord ou un plan de prévention de la pénibilité ?
L’accord ou le plan d’action comporte des mesures relatives à au moins deux des thèmes suivants :
- la réduction des polyexpositions1 au-delà des seuils de pénibilité ;
- l’adaptation et l’aménagement du poste de travail ;
- la réduction des expositions aux facteurs de risques professionnels.
S’y ajoutent au moins deux des thèmes suivants :
- l’amélioration des conditions de travail, notamment au plan organisationnel ;
- le développement des compétences et des qualifications ;
- l’aménagement des fins de carrière ;
- le maintien en activité des salarié·e·s exposé·e·s aux facteurs de risques professionnels.
L’objectif étant de réduire le nombre de salarié·e·s exposé·e·s à la pénibilité au travail, l’accord doit reposer sur un diagnostic des expositions à réaliser au préalable.
1Polyexposition : expositions par des voies multiples (via l’inhalation, l’ingestion et/ou le contact cutané), à des agents/nuisances multiples, qu’ils soient chimiques, biologiques, physiques en tenant compte de l’influence des facteurs organisationnels et psychosociaux, et ce tout au long de la carrière professionnelle. Source : Anses.
En cas d'absence d'accord
À défaut d’accord, un plan d’action unilatéral de l’employeur pourra être arrêté après avis du CSE. Mais l’employeur qui ne négocie pas encourt une pénalité. L’employeur qui utilise un référentiel de branche ne peut en revanche pas être pénalisé.
Cette négociation peut être intégrée à la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail.
Qu'est-ce que l'indice de sinistralité (et comment le calculer) ?
L’indice de sinistralité est le rapport, pour les trois dernières années, entre le nombre d’accidents du travail (AT) et de maladies professionnelles (MP) imputables à l’employeur, à l’exception des accidents de trajet, et l’effectif de l’entreprise tel que le définit l’art. R130-1 du Code de la Sécurité Sociale (celui retenu pour les règles relatives au calcul et au recouvrement des cotisations et contributions de sécurité sociale).
Pour un ratio sur 3 ans :
Nbre d’AT et MP reconnus et imputés (hors AT trajets)
/
Effectif déclaré pour cotisations et contributions SS
Attention :
- il est important de prendre en compte l’ensemble des AT/MP, y compris ceux n’ayant pas généré d’arrêt de travail ;
- Retenir, au titre des « 3 dernières années connues », les années N-3, N-2 et N-1 ; toutefois, en pratique, pour 2019, ce sont les années N-4, N-3 et N-2 (à savoir 2015, 2016 et 2017) qui seront prises en compte puisque la notification à l’entreprise de son taux d’AT/MP intervient en tout début d’année ;
- Retenir comme effectif celui de l’année N-1 ; toutefois, en pratique, pour 2019, c’est l’effectif N-2 qui serait pris en considération.
Exemple
Nous sommes en janvier 2019. L’entreprise a déclaré un effectif de 500 salariés en 2018 (« égal à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l'année civile précédente » Extrait de l’article R130-1 du Code de la SS).
Dans cette entreprise, l’effectif exposé au titre du C2P est de 10%. Cependant, en 2015 on recense 37AT+4 MP, en 2016 : 35 AT et 9 MP et en 2017 : 40 AT et 7MP.
L’indice de sinistralité sera donc de :
132 AT+MP / 500 salariés = 0,26
Le seuil étant supérieur à 0,25 l’employeur est dans l’obligation d’engager une négociation sur la prévention de la pénibilité.