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[Interview] Partage de la valeur et rémunérations – les conseils de Christelle et Elsa

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Le partage de la valeur ajoutée s’inscrit pleinement dans les prérogatives des représentants des salariés. Nos expertes Elsa et Christelle vous disent en quoi ce sujet est crucial, d’autant plus en période d’inflation et de perte de pouvoir d’achat.

Interview

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Christelle Previtali (CP) : Je travaille à Syndex depuis 2007. Basée à Toulouse, j'interviens notamment sur le secteur des services, et suis référente du pôle social de Syndex.

Elsa Costanzo (EC) : à Syndex depuis 2015, je travaille sur le champ des services et, en particulier, le commerce. Basée à Montpellier, je suis spécialisée sur les questions économiques et financières, et suis référente du pôle diagnostic financier de Syndex.

Qu'est-ce que le partage de la valeur ? Quel chiffre retenez-vous de l'enquête flash Syndex sur le partage de la valeur ?

EC : Le partage de la valeur est une notion clef pour les représentants des salariés. Elle est notamment citée par le code du Travail comme un sujet à interroger lors d’une consultation sur la situation économique et financière. Cependant, aujourd’hui, cette notion connaît une certaine dérive sémantique en la réduisant à la seule politique de primes défiscalisées (Prime de Partage de la Valeur).  
La définition de la valeur ajoutée et de son partage renvoie à une approche économique traditionnelle. La valeur ajoutée correspond à la richesse créée par l’entreprise au travers de ses activités et qui est partagée entre les différentes parties prenantes que sont : l’État, les partenaires financiers, les actionnaires et/ou le groupe d’appartenance, les salariés et toute personne travaillant dans l’entreprise (CDI, CDD, intérimaires, etc.), ainsi que la part résiduelle restant dans l’entreprise et pouvant notamment être utilisée au renforcement de la situation financière et au financement des investissements. Il s’agit donc d’analyser comment la richesse produite par l’entreprise est répartie entre tous ceux qui ont œuvré à sa production. Concernant les salariés, le premier dispositif de partage de la valeur est bien le salaire et sa revalorisation.

Quel chiffre retenez-vous de l'enquête flash Syndex sur le partage de la valeur ?

CP : 3/4 des personnes interrogées déclarent avoir perdu en pouvoir d'achat alors que, sur la même période, pour 56 % des répondants, l'entreprise a augmenté ses bénéfices. Cela interroge sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise.  

EC : Dans une société où le taux de salariés au SMIC augmente fortement, c'est alarmant. D’autant que les profits dans certains secteurs n'ont jamais été aussi élevés.

En quoi les élus ont-ils intérêt à se faire accompagner sur la thématique du partage de la valeur ?

CP : Tout d’abord pour apprécier son évolution dans le temps. Quand on parle de partage de la valeur, les élus doivent connaitre la part qui revient aux salariés, et celle qui revient aux actionnaires. C’est l’expert, à travers ses pouvoirs d’investigations, qui pourra apporter ces éléments de réponse, et ainsi apprécier l’évolution de ce partage de la valeur dans le temps.
De plus, certains dispositifs sont nouveaux, comme celui de partage de la valeur en cas de bénéfice exceptionnel, qui laisse pas mal de marge de manœuvre et d'interprétation aux directions qui peuvent être amenées à y intégrer un peu ce qu’elles veulent. Syndex a été interpellé par certains élus qui souhaitaient des précisions sur les indicateurs à considérer. Comme c’est tout nouveau, si les élus n'ont pas de référentiel, ils pourraient être amenés à négocier des indicateurs non conformes à l’esprit de la loi.  

EC : Se faire accompagner, c’est mieux connaître les marges de manœuvre financières et les mettre en relation avec le montant de la valeur ajoutée et l'évolution de sa répartition pour négocier au mieux les augmentations de salaires. De plus, il est important de bien connaître les mécanismes qui existent pour améliorer la rémunération globale : participation, intéressement, plan épargne entreprise, prime de partage de la valeur...

En cette période d'inflation qui persiste, quels seraient vos conseils/ points de vigilance en matière de négociation d'accords sur les rémunérations (ex-NAO) et de partage de la valeur ?

CP : Les dispositifs de partage de la valeur sont pour certains des primes désocialisées, c’est-à-dire exonérées de cotisations sociales. Or ces cotisations ne représentent pas un coût pour les salariés, mais une rémunération différée (protection sociale, retraite, etc.) ou la garantie d’accès à un service public de qualité. 
De plus, ces dispositifs ne sont pas pérennes, car pour la plupart ils sont sur une durée de quelques années au mieux voire un an. Il faut prioriser autant que faire se peut les augmentations de salaires à travers les augmentations générales, collectives ou le cas échéant les augmentations individuelles.
C’est aussi important de toujours garder un œil sur l'inflation pour essayer d'argumenter par rapport à ce taux.
Et puis bien définir les objectifs en amont et sortir de la simple négociation du pourcentage de la masse salariale, qui reste en général stérile. Aller sur des objectifs plus qualitatifs est plus compliqués à contre-carrer pour les directions. 
Enfin, avant d’entrer en négociation sur les rémunérations, il faut appréhender la situation économique et financière, afin d’apprécier les marges de manœuvres de l’entreprise.

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