Auto : marges records pour les constructeurs en 2021 !
Afficher l'article en plein écranEn dépit des multiples pénuries post-covid, les constructeurs ont dégagé des marges exceptionnelles en 2021. Comment l’expliquer ?
Un marché a priori peu porteur
Le marché mondial a faiblement repris en 2021 (+4,7%), après le terrible creux de 2020 : les ventes restent inférieures à 80 millions de véhicules, loin des 90 millions de 2019, sachant que l’impact de la crise des semi-conducteurs a été estimé à une dizaine de millions de véhicules.
L’Europe a davantage subi ces perturbations que d’autres régions du monde. Les ventes de véhicules particuliers sur le Vieux Continent demeurent au niveau de 2020, à 11,8 millions d’unités (12 millions en 2020), soit 25% de moins qu’en 2019. Dans cette période, les véhicules électrifiés ont commencé à prendre une place importante sur le marché européen, représentant 40% des volumes vendus (20% pour les hybrides légers, 10% en purs électriques et presque autant pour les hybrides rechargeables).
Le contexte n’était donc pas favorable pour les acteurs de l’industrie automobile, ce qu’ils ne manquent pas de faire savoir lorsqu’ils font pression auprès des pouvoirs publics pour demander des aides, ou auprès de leurs sous-traitants pour exiger des baisses de prix, ou auprès de leurs salariés, pour justifier de restructurations qui restent fortes sur la dernière période.
Mais des prix opportunément dopés par la pénurie de composants
En manque de composants électroniques, les constructeurs ont fait le choix de privilégier, dans leur portefeuille de produits, les véhicules à plus forte marges. Parallèlement, tirant parti de l'allongement des délais de livraison, ils n’ont pas hésité à augmenter les prix de vente (ce que certains avaient initiées depuis quelques années).
Au final, si les volumes ont peu progressé, le chiffre d’affaires de la plupart des constructeurs a largement augmenté entre 2020 et 2021 et leur marge opérationnelle plus encore, dépassant même les taux des années 2017-2019.
Variation entre 2020 et 2021 des ventes, du chiffre d'affaires et de la marge opérationnelle
À noter sur ce graphique :
- seule exception, GM qui avait un résultat exceptionnellement élevé en 2020 mais dont le taux de marge opérationnelle progresse par rapport aux années précédentes, et atteint 7,6% en 2021.
- Renault est passé d’un résultat déficitaire à une marge opérationnelle de 3,6% de son CA. S’il est en retard sur les autres, il n’en a pas moins profité pour redresser ses résultats. On sait l’orientation prise par Luca de Meo, en faveur du « pricing power » cher à Carlos Tavares.
Ainsi, Stellantis a quasiment doublé sa marge opérationnelle en 2021, la portant à 18 Md€ (après coûts de restructuration), dont 8,5 Md€ proviennent d’une hausse des prix et 3,3 Md€ d’une part plus importante des véhicules à plus forte marge dans les ventes (effet mix).
Ce phénomène de hausses de prix et de marges devrait se poursuivre en 2022 et 2023 selon la toute récente étude du cabinet Alix Partner.
À l’heure actuelle, les hausses des cours des matières premières flambent, ainsi que l’énergie. Les équipementiers et sous-traitants ont du mal à obtenir des constructeurs une prise en charge des surcoûts… et les salariés peinent à maintenir leur pouvoir d’achat. Il existe certainement des marges de manœuvre pour élargir la solidarité au sein de la filière, dans un contexte de forte transformation du travail.